Label du Patrimoine européen

Depuis 2013, le Label du Patrimoine européen est décerné par l’Union européenne à des symboles ou à des sites témoins de l’héritage européen et choisis pour le rôle qu’ils ont joué dans l’histoire européenne et les activités qu’ils proposent, qui doivent permettre de rapprocher les Européens de leur histoire commune et de l’Union européenne.

Objectifs

Il s’agit d’aider les citoyens européens à mieux comprendre l’histoire de l’Europe, sa construction, le patrimoine culturel commun, au travers des valeurs démocratiques et des droits de l’homme. Ce label vise aussi à sensibiliser les jeunes, en renforçant le dialogue interculturel via l’éducation artistique et les éducations à la culture et à l’histoire.

 

Sites

A ce jour, 48 sites européens ont été labellisés dont 5 français : Cluny (Saône-et-Loire), la maison de Robert Schuman à Scy-Chazelles (Moselle), le quartier européen de Strasbourg (Bas-Rhin), l’ancien camp de concentration de Natzweiler et ses camps annexes (France-Allemagne), le lieu de Mémoire au Chambon-sur-Lignon (Haute-Loire).

Les sites du patrimoine européen sont des jalons dans la création de l’Europe du XXIe siècle ; ils célèbrent et symbolisent les valeurs, l’histoire, l’intégration et les idéaux européens.

L’esthétique des sites du patrimoine européen n’est pas leur seul atout : ils font revivre l’histoire. L’accent est mis sur la promotion de la dimension européenne des sites et l’accès à ceux-ci. Une large gamme d’activités éducatives est proposée, en particulier pour les jeunes. Les visiteurs peuvent y percevoir toute l’ampleur et l’importance de ce que l’Europe a accompli et de ce qu’elle a à offrir.

Distinguer les labels

Il ne faut pas confondre le Label du patrimoine mondial de l’UNESCO avec le Label du patrimoine européen ; le premier encourage l’identification, la protection et la préservation du patrimoine culturel et naturel dans le monde, tandis que le second met l’accent sur l’histoire européenne et la contribution des sites à l’évolution de l’histoire et de l’unité européennes.

Trois exemples parmi les 48 sites

  • Zdravljica: le message du Printemps européen des peuples (Slovénie), 2020

Zdravljica est un poème de France Prešeren[1], publié en 1848, après l’abolition de la censure dans l’Empire des Habsbourg, dans le cadre du Printemps des Peuples[2]. Écrit en slovène, il a influencé le développement de l’identité de ce pays, et plus généralement la promotion de la liberté d’expression. L’accueil positif du poème et sa transmission à travers l’Europe via des traductions allemandes et scandinaves (1860-1880), anglaise et dans d’autres langues au milieu du XXe siècle, ont fait connaître le contenu du poème. Son importance a été illustrée en 1944 lorsque les partisans résistaient au fascisme nazi, et lorsqu’il a été chanté à diverses occasions dans les années 1980 et au début des années 1990 pendant la période de démocratisation menant à l’indépendance de la Slovénie.

En 1991, dans la nouvelle République slovène, le septième verset du poème a été choisi comme hymne national : l’idéal d’une coexistence pacifique de toutes les nations y est exprimé. Une citation du poème est estampillée sur la pièce nationale de 2 € et également gravée sur un mémorial érigé en 2008 devant le bâtiment Justus Lipsius du Conseil de l’UE à Bruxelles, pendant la présidence slovène.

  • Le patrimoine culturel sous-marin des Açores (région ultrapériphérique de l’Union, Portugal), 2020

Le patrimoine culturel sous-marin des Açores se compose d’un réseau de 30 sites de plongée publics centrés sur une série d’épaves datant du XVe au XXe siècle. Cet archipel était d’une importance stratégique pour les voyages transatlantiques et donc lié à différents aspects de l’histoire et du commerce européens, comme, par exemple :

–——- –la Route d’Argent vers l’Amérique du Sud ;
– la traite transatlantique des esclaves ;
– les conflits militaires tels que la guerre d’indépendance américaine et les deux guerres mondiales ;
– les navires d’émigration de l’Europe vers l’Amérique ;
– les expéditions d’exploration telles que le Voyage du Beagle[3] sur lequel Charles Darwin a voyagé autour de l’Amérique du Sud.

Le patrimoine culturel sous-marin des Açores témoigne du rôle de l’archipel dans l’histoire européenne pour la navigation transcontinentale sur plusieurs siècles. Les naufrages des Açores fournissent des preuves matérielles de l’expansion des Européens à travers les océans et des premiers points de départ de la mondialisation en termes de commerce, d’actions militaires, de migration, par exemple. Les épaves sont présentées comme des témoins de l’histoire européenne, symboles de diverses époques et de différents territoires.

  • Mémorial de Sighetu Marmației, (Nord de la Roumanie), 2018

Ana Blandiana[4] écrit « La victoire la plus importante du communisme, dont on ne s’est rendu compte qu’après 1989, a été la création de l’individu sans mémoire, le soi-disant homme nouveau, qui ignore qui il était, ce qu’il possédait et ce qu’il faisait avant le communisme. Le Mémorial des Victimes du Communisme et de la Résistance se propose de contrecarrer cette victoire et de raviver la mémoire collective ».

Le Mémorial dont la fondation a été initiée par Ana Blandiana et son mari Romulus Rusan[5] se compose du Musée de Sighetu Marmației et du Centre International d’Etudes sur le Communisme (dont le siège se trouve à Bucarest). Il est une institution de la Mémoire, unique en son genre en raison du fait qu’il est à la fois un institut de recherche, de muséographie et d’enseignement.

Le Mémorial est logé dans une ancienne geôle stalinienne utilisée pour emprisonner les écoliers, les étudiants et les paysans de la résistance (1948-1950), les opposants politiques, les journalistes et les ecclésiastiques (1950-1955) et les criminels de droit commun jusqu’aux années 1970. Il est aujourd’hui un mémorial aux victimes des régimes communistes et montre le développement et les effets des régimes communistes en Roumanie et dans d’autres pays d’Europe de l’Est. Le Mémorial donne un aperçu de la répression par les régimes communistes en Europe tout au long du XXe siècle, y compris la mort et la souffrance qui en ont résulté à l’intérieur et à l’extérieur des murs de la prison.


[1] (1800-1849) Avocat mais surtout poète slovène célébré dans toute l’Europe comme l’un des plus grands romantiques ; le 8 février (1849), date de sa mort, est maintenant jour férié et Fête de la culture slovène.

[2] La révolution européenne de 1848-1849 est un mouvement complexe, dont l’imagerie historique a surtout retenu le caractère libérateur à l’égard des États hostiles à l’émancipation des minorités nationales. C’est en ce sens qu’on a parlé d’un « printemps des peuples ». Elle traduit en fait, d’un pays à l’autre, des revendications différentes, conséquence de la diversité des cultures politiques et surtout de la nature et de l’influence des couches sociales qui participent à la lutte contre les oligarchies d’Ancien Régime détentrices du pouvoir.
La littérature, écrite dans des langues nationales ou minoritaires, a mis en exergue des sentiments nationalistes et des demandes de suppression de la censure et du droit à la liberté d’expression.

[3] Le Voyage du Beagle est le titre le plus couramment donné au livre de Charles Darwin publié en 1839 sous le titre Journal et remarques ; cet ouvrage, connu aussi sous le nom de Journal de recherches, lui valut célébrité et respect de ses pairs.

[4] Née en 1942, Otilia Valeria Coman est connue sous son nom de plume d’Ana Blandiana, poétesse, essayiste et figure politique roumaine.

[5] (1935-2016) écrivain roumain, fondateur en 1990 de l’organisation non gouvernementale Civic Alliance qui promouvait le développement de la société civile en Roumanie, tout en jouant un rôle important dans sa démocratisation. Il a été directeur du Mémorial des victimes du communisme et de la résistance et à la tête du Centre international pour l’étude du communisme.

 

Sources :

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