
© European Union, 2025
Du 10 au 21 novembre 2025, et prolongée d’un jour, s’est tenue à Belém en Amazonie brésilienne la COP 30, la 30ème Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques ou encore Conférence des parties.
Des 197 pays, plus l’Union européenne, parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CNUCC), 194 étaient annoncés dont une soixantaine étaient représentés les 6 et 7 novembre au sommet des Chefs d’Etat et de gouvernement, en amont de la Conférence. Pour l’Europe, présents, les pays extracommunautaires comme le Royaume-Uni, la Norvège…, les 27 Etats membres et l’Union en tant que telle avec la venue de la Présidente de la Commission, Ursula von der Leyen et du président du Conseil européen António Costa.
Parmi les quelques absents, le deuxième émetteur mondial de gaz à effet de serre (GES) : les Etats-Unis[1].
Pour l’Union européenne, la COP 30 constituait, un moment si ce n’est de vérité du moins de clarification.
Dans la lancée de la COP 21 et des engagements inscrits dans l’accord de Paris de 2015, la Présidente de la Commission nouvellement élue en décembre 2019, déclarait quelques jours après son entrée en fonction : « Aujourd’hui, il s’agit de réconcilier l’économie avec la planète » et annonçait l’objectif de faire de l’Europe le premier continent neutre en carbone en 2050 avec, en étape intermédiaire, une réduction de 55 % des émissions nettes d’ici 2030. Pour l’atteindre, 8 domaines d’activités étaient concernés : marché carbone, énergie propre, transports durables, zéro pollution, économie circulaire, rénovation énergétique des bâtiments, stratégie agricole et alimentaire, stratégie biodiversité[2].
Une telle ambition au cœur du Pacte vert installait l’Union à l’avant-garde de la lutte contre le réchauffement climatique de la planète.
Et durant 3 ans, la Commission européenne a élaboré « un arsenal législatif massif »[3] conférant à l’Union le leadership mondial en matière climatique.
Cependant, depuis 2 ans, s’est opéré ce que Patrick Salez appelle un « détricotage », d’autres analystes parlant de « reculade européenne ».
Dans un contexte géopolitique difficile, avec notamment la guerre en Ukraine et un climat économique préoccupant sur fond de décrochage technologique et industriel, la priorité du Pacte vert s’est étiolée.
Fin 2024, la moitié seulement des textes législatifs sont appliqués.
Depuis des mois, au nom de la compétitivité, plusieurs états membres appuyés par de puissants groupes de pression réclament une pause réglementaire et, début 2025, afin d’alléger les contraintes pesant sur les entreprises, la simplification règlementaire est engagée. Une loi « omnibus » regroupant dans une unique proposition plusieurs révisions de textes existants du Green deal est adoptée le 13 novembre 2025, par une majorité d’eurodéputés de droite (PPE) et d’extrême droite (PfE + CRE). Elle assouplit des mesures comme le devoir de vigilance et de transparence et supprime l’obligation pour les entreprises de mettre en œuvre un plan de transition climatique.
Ajoutons que, depuis des mois, la pression de milieux économiques puissants s’accentue pour obtenir la suppression de mesures emblématiques du Pacte vert : ainsi les firmes automobiles européennes, relayées par des organes de presse influents, demandent de revenir sur l’interdiction totale, à compter du 1er janvier 2035, de la vente de voitures neuves à moteur thermique (essence ou hybride).
Enfin à l’approche de la COP 30, les Etats membres sont divisés et, s’ils parviennent difficilement à s’accorder sur une fourchette de réduction des GES comprise entre 66,25 et 72,5 % pour 2035[4], ils arrivent à Belém avec une simple déclaration d’intention de réduire de 85 % pour 2040 (référence 1990).
Au sommet des Chefs d’état et de gouvernement, en préambule des négociations, le président du Conseil européen et la présidente de la Commission se sont succédé pour énoncer les objectifs climatiques de l’Union et réitérer l’engagement de celle-ci auprès des pays partenaires. Quant aux négociations proprement dites, elles ont été menées pour l’Union par le commissaire européen au climat, Wopke Hoekstra et par le ministre du climat et de l’énergie du Danemark au titre du pays exerçant la présidence du Conseil, accompagnés par une délégation du Parlement européen.
La COP 30 s’annonçait difficile car, outre le contexte géopolitique mondial compliqué, à la date butoir, près de 70 pays dont l’Inde, l’Argentine, l’Arabie saoudite, n’avaient pas remis leur contribution climatique nationale c’est-à-dire leur engagement de réduction d’ici 2030. Durant les 12 jours, les discussions ont été âpres, l’ambiance parfois très tendue au point pour l’Union d’envisager de quitter la conférence.
Pourtant, avec une prolongation d’une journée, un accord final a été trouvé dont on peut dégager plusieurs constats :
- la COP 30 n’a pas implosé et les signataires ont réaffirmé leur engagement en faveur du multilatéralisme et de l’accord de Paris ;
- des efforts financiers pour l’adaptation climatique des pays vulnérables ont été consentis notamment par l’Union européenne mais sans chiffrage précis ce qui a valu à cette dernière des critiques acerbes ;
- l’UE, malgré l’appui des autres Etats européens, de pays latino-américains dont la Colombie et d’Etats insulaires, a échoué à obtenir une feuille de route de sortie des énergies fossiles face à la résistance des grands pays pétroliers (Arabie saoudite, Russie, Nigéria)… et de pays émergents (Inde)[5].
- l’Union, pourtant championne du multilatéralisme commercial , s’est fait damer le pion par la Chine qui s’est affirmée comme l’interlocuteur privilégié du sud ;
- en signant, l’Union européenne se résigne à un accord minimal et pour le coup décevant. « On a obtenu le fait de ne pas reculer », a déclaré la ministre française de la Transition écologique. « Nous devons le soutenir car, au moins, il nous emmène dans la bonne direction », selon Wopke Hoekstra le commissaire européen au climat.
Au total, si la COP 30 a quelque peu entamé le leadership de l’UE en matière climatique, elle a surtout mis en valeur son isolement. Puissent les dirigeants européens en tirer quelques leçons.
[1] Pas de délégation officielle mais la présence d’une centaine de responsables américains locaux, gouverneurs, maires et autres élus.
[2] Nous nous appuyons sur l’information précieuse délivrée par Patrick Salez, membre du team Europe, lors du café de l’Europe proposé par la MdE du Limousin le 24 octobre 2025 sous l’intitulé : « Entre espoirs et déboires : le Pacte Vert européen ».
[3] Idem
[4] Malgré l’opposition de la Hongrie, la Slovaquie, la République tchèque et la Pologne, l’adoption a été obtenue grâce à la majorité qualifiée grâce à l’abstention de la Bulgarie et de la Belgique.
[5] Dans le texte de l’accord, on ne trouve qu’une allusion indirecte aux énergies fossiles au travers du rappel du consensus de la COP 28 à Dubaï.