L’Espagne européenne

© Site de la présidence espagnole du Conseil de l’UE

Désormais le soleil se couche sur l’Espagne : de retour en Europe depuis la fin du Franquisme (1975), le pays préside le Conseil de l’Union européenne (UE) au second semestre 2023.

A la suite du décès de Franco (1975) s’ouvre en Espagne une période de transition vers la démocratie et la mise en place d’une monarchie constitutionnelle en 1978.

Juan Carlos Ier accède au trône en 1975, abdique le 2 juin 2014 et son fils Felipe VI lui succède. Le monarque dispose de pouvoirs politiques et symboliques : il est le chef de l’Etat et des armées, ratifie les lois, nomme le président du gouvernement ; il représente l’Etat espagnol dans les relations internationales.

Le pouvoir exécutif est détenu par le Président du gouvernement pour une durée de quatre ans, renouvelable. Pedro Sanchez occupe cette fonction depuis le 2 juin 2018.

Le pouvoir législatif est dévolu aux Cortes Generales, le Parlement, composé d’une chambre haute, le Sénat (264 membres), et d’une chambre basse, le Congrès des députés (350 membres élus pour quatre ans au suffrage universel dont 208 élus directement et 56 désignés par les Régions).

L’espagnol (ou castillan) est la langue officielle d’un pays multilingue, organisé en dix-sept communautés autonomes et, sur le continent africain, deux villes autonomes : Ceuta et Melilla. Plusieurs de ces communautés ont des langues co-officielles : le catalan en Catalogne et aux îles Baléares, le valencien pour la Communauté valencienne, le basque dans certaines régions de Navarre et le Pays basque, le galicien en Galice.  

Elles ont chacune leurs propres institutions et d’importantes compétences. C’est un système proche du fédéralisme, mais les communautés influent peu sur la politique nationale et, à la différence des Etats fédérés, le Sénat ne représente pas les régions.

La pression indépendantiste en Catalogne s’est traduite par une victoire du oui au referendum du 1er octobre 2017 sur l’indépendance. Mais, considéré comme illégal par le gouvernement et par la justice espagnole, ce résultat n’a pas eu de suite et Carlos Puigdemont, son initiateur, a été contraint à l’exil.

La fin du franquisme ouvre les perspectives européennes pour l’Espagne. En 1962, une première demande d’adhésion a été rejetée en raison de la situation du pays ; la coopération avec l’Europe est limitée aux seules questions économiques. Après la mort de Franco, l’Espagne dépose sa candidature à l’entrée dans l’UE en 1977, dans le mois qui a suivi l’organisation des premières élections législatives démocratiques. Le 1er janvier 1986, après six ans de négociations, l’Espagne devient membre de l’UE avec le Portugal et la signature du traité d’adhésion a lieu au palais royal de Madrid le 12 juin 1985.

L’Espagne est représentée au Parlement européen par 59 députés. Josep Borell Fontelles, le Commissaire espagnol européen, « Haut Représentant de l’Union pour les Affaires étrangères et la Politique de sécurité », est responsable de la diplomatie européenne.

L’adhésion permet l’ancrage de la démocratie en Espagne et le relèvement du niveau de vie des habitants du pays. L’économie espagnole est devenue moderne en quelques décennies. Les trois-quarts de la population sont employés dans le secteur tertiaire ; l’Espagne est la deuxième destination touristique du monde, après la France et devant les Etats-Unis.

A l’issue des élections législatives du 23 juillet 2023, l’Europe est partagée entre soulagement, avec le recul de l’extrême droite, et crainte d’un blocage politique (Voir l’article « les élections législatives en Espagne »).

Depuis l’adhésion en 1986, c’est la cinquième présidence espagnole du Conseil de l’Union européenne, au deuxième semestre 2023. L’Espagne fait partie d’un trio avec la Belgique et la Hongrie, qui prendront la suite en 2024.

Le programme du trio a pour objectif général d’accroître la compétitivité mondiale de l’UE ; la présidence espagnole donnera la priorité au renforcement de l’unité européenne, en particulier dans le soutien accordé à l’Ukraine. L’Espagne souhaite attirer l’attention de l’UE sur deux régions cruciales : l’Amérique latine et le voisinage méditerranéen.

Un sommet UE-CELAC (Communauté des Etats d’Amérique latine et des Caraïbes) a été organisé à Bruxelles les 17 et 18 juillet derniers. Lancée en 2010, la CELAC est un ensemble régional de 33 Etats latino–américains et des Caraïbes. Les dirigeants se sont engagés à renouveler leur partenariat, établi de longue date, en faveur d’un système multilatéral solide fondé sur des règles ; à faire progresser la stabilité et la paix dans le monde (inquiétude face à la guerre en cours en Ukraine, dialogue en Haïti, négociations menées par le Venezuela à Mexico). Volonté de protéger la planète, renforcement des liens économiques entre l’UE et le Mercosur, promotion d’une transition numérique axée sur l’humain, lutte contre la criminalité sous toutes ses formes ont également fait l’objet d’entretiens au cours de ce sommet.

L’Espagne souhaite une gestion humaine et solidaire des migrations. La clôture du Pacte sur la migration et l’asile constitue un grand défi, pour surmonter les différences entre les Etats européens. Pour l’Espagne, le voisinage sud de l’Europe, le Maroc en particulier, est une région importante avec les questions migratoire et territoriale. Le soutien de l’Espagne au Front Polisario (Sahara occidental), le statut des enclaves de Ceuta et de Melilla, la délimitation des eaux territoriales canariennes sont au cœur des tensions avec le Maroc qui a favorisé l’entrée illégale de migrants à Ceuta en 2021. En mars 2022, un courrier de Pedro Sanchez au roi du Maroc qualifie de « sérieux, réaliste et crédible »le plan marocain d’autonomie du Sahara occidental. Ces concessions espagnoles favorisent la réconciliation entre les deux pays qui feront équipe avec le Portugal pour accueillir la coupe du monde de football en 2030.

Le programme espagnol de la présidence a aussi pour priorités la réindustrialisation de l’UE, la promotion d’une plus grande justice sociale et économique, la garantie de la sécurité alimentaire.

Le semestre de cette présidence sera jalonné de 22 réunions ministérielles en Espagne, le Conseil européen informel se tenant à Grenade.

Répondre