Ouverture des négociations d’adhésion de la Macédoine du Nord à l’UE

Czech, Albanian, European, North Macedonian and French flags

La Macédoine du Nord, petit pays des Balkans (2 Mh, 25 713 km2), a déposé sa candidature d’entrée dans l’UE en 2005. L’ouverture des négociations d’adhésion est acceptée par l’Union européenne en juillet 2022 ; pourquoi une si longue attente ? Bien que les Balkans occidentaux représentent un intérêt stratégique et économique, plusieurs pays (dont la France et les Pays-Bas), s’opposent à l’élargissement de l’UE à cet ensemble : image négative des Balkans, coûts élevés induits par l’adhésion de pays en retard économique. Les négociations d’adhésion ont été repoussées par le Conseil en octobre 2019 (la France étant favorable à un approfondissement de l’UE avant son élargissement).

La Grèce, dont une des régions s’appelle Macédoine, avait un litige sur le nom du pays ; pour Athènes, le nom du pays candidat portait une revendication territoriale sur sa province homonyme. En 2018, la Grèce a obtenu que l’ancienne République Yougoslave de Macédoine soit rebaptisée « Macédoine du Nord ».

En 2020, le gouvernement bulgare de Boïko Borissov (conservateur) rallume le conflit identitaire avec la Macédoine. Il prétend que les Macédoniens sont des Bulgares sans identité propre, qu’ils ne disposent pas d’une véritable langue mais d’un dialecte bulgare et qu’ils ont, jusqu’à la formation de la République de Macédoine au sein de la Yougoslavie, une histoire commune. Borissov reproche au gouvernement macédonien de présenter la Bulgarie comme un ennemi dans les medias et dans les livres d’histoire. Les deux pays se disputent la mémoire de Gotse Deltchev (1872-1903), champion de la lutte contre les Ottomans[1].

La Macédoine est une mosaïque multiethnique. Dans cette région des Balkans, le relief montagneux a favorisé le développement d’une zone de peuplement instable, sans limitation de territoires, avec des peuples entremêlés.

Mais, pour certains observateurs, ce différend historique ente Bulgarie et Macédoine ne pourrait être qu’un leurre, un enjeu de politique intérieure. L’adoption d’une position nationaliste est une tactique familière dans les Balkans : le rappel de conflits historiques émotionnels permet de gagner des points en vue d’élections à venir.

La Bulgarie est, quant à elle, le pays le plus pauvre et le plus corrompu de l’UE. Au milieu de l’année 2020 s’élèvent des protestations contre « la dictature de la mafia ». Après les élections de 2021, Borissov est écarté du pouvoir.

La guerre en Ukraine fait évoluer la position des dirigeants européens qui font pression sur le Parlement et les partis bulgares. En juin 2022, une motion présentée par le parti bulgare démocratique demande que la Macédoine modifie sa constitution pour inclure les Bulgares dans les peuples ethniques reconnus, mais la Bulgarie ne reconnaît pas la langue macédonienne.

Le 17 juillet 2022, Bulgarie et Macédoine signent un protocole bilatéral proposé par la présidence française du Conseil de l’UE au premier semestre 2022. La Macédoine du Nord doit modifier la constitution du pays pour reconnaître les Bulgares parmi les bâtisseurs de la région, pour protéger les droits des minorités dans le pays, pour modifier les manuels scolaires contenant des références négatives envers la Bulgarie.

Mais une majorité de deux tiers des députés doit adopter cette révision de la constitution. Le revirement des conservateurs (le GERB de Borissov) a permis ce vote au Parlement bulgare. Or cet accord intervient dans un contexte de crise politique bulgare ; le Premier ministre pro-européen, Kiril Petkov, leader du parti socialiste (BSP), ayant échoué à former un gouvernement, le Parlement est dissous ; une nouvelle élection anticipée est prévue pour l ‘automne. Cette situation risque de compromettre toute avancée sur le dossier des Balkans occidentaux.

Articles de presse :

https://www.euractiv.fr/section/elargissement/news/lue-accepte-dentamer-les-negociations-dadhesion-avec-lalbanie-et-la-macedoine-du-nord/


[1]Gotse Deltchev est né en Grèce, il a enseigné dans une école bulgare en Macédoine du Nord actuelle.

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