Discours sur l’état de l’Union 2022

© EC – Service audiovisuel – 2022 – Dati Bendo

Instauré par le traité de Lisbonne, le discours sur l’état de l’Union permet depuis 2010 de dresser le bilan de l’année qui vient de s’écouler et d’annoncer les chantiers prioritaires et initiatives phares de l’année à venir.

Exercice rituel de rentrée parlementaire, sans doute, sauf que ce 3eme discours de la mandature Leyen, plus encore que les deux précédents, s’inscrit dans un contexte dramatique et dans une incertitude fortement anxiogène. En 2020 et 2021, la crise sanitaire sévissait mais l’Union forgeait sa parade à base de solidarité. En cet automne 2022, le Covid, bien que toujours présent,  est relégué au second rang des préoccupations des Européens par une crise plus périlleuse encore pour la cohésion de l’Union. En 2019, lors de sa prise de fonction, Mme von der Leyen souhaitait une Commission davantage géopolitique. On peut dire familièrement, qu’elle est servie. Examiner la teneur de son propos, si peu rapporté par la presse française, paraît être une nécessité minimale pour les citoyens européens que nous sommes.

La crise en question, c’est évidemment la guerre russe en Ukraine et c’est, sans surprise,  par le dossier ukrainien que l’oratrice a débuté son discours. Vêtue aux couleurs du drapeau ukrainien,  jaune et bleu ciel, avec à ses côtés, en tant qu’invitée d’honneur, l’épouse du président ukrainien Zelensky ainsi que deux jeunes réfugiés ukrainiens dans leur pays, la présidente de la Commission européenne a renouvelé un soutien sans faille à l’Ukraine : « La solidarité de l’Europe avec l’Ukraine demeurera indéfectible ». Sur un mode lyrique, « Nous avons ravivé la force intérieure de l’Europe »,  elle s’est félicitée de l’élan de solidarité qui a saisi le continent tout entier et a souligné les enjeux pour l’Union de la guerre menée par la Russie : « Il s’agit d’une guerre contre notre sécurité énergétique, contre notre économie, contre nos valeurs et contre notre avenir. Une guerre de l’autocratie contre la démocratie. » et poursuivant, elle a annoncé, outre le maintien des sanctions à l’égard de la Russie, un effort financier supplémentaire pour aider à la reconstruction de l’Ukraine notamment par la réhabilitation des écoles et à l’intégration du pays dans le marché intérieur européen.

Parmi les conséquences de la guerre, il en est une qui inquiète beaucoup les Européens, la sécurité énergétique. Consciente de la puissance de l’arme énergétique russe et de la détermination de Poutine à l’utiliser pour briser la cohésion européenne, Mme von der Leyen appelle à amplifier la réponse européenne déjà engagée.  Au stockage commun et à la baisse des importations de gaz russe, la Commission ajoute une réduction de la consommation globale d’électricité des Etats membres et des mesures de soutien aux entreprises et aux particuliers vulnérables, mesures dont le financement serait pour partie assuré par le plafonnement des recettes des entreprises productrices d’électricité à faible coût. A terme, afin de découpler les prix de l’électricité de l’influence dominante du gaz, une réforme complète et en profondeur du marché de l’électricité sera proposée.

Le discours sur l’état de l’Union n’a pas seulement porté sur la guerre en Ukraine et ses enjeux.

La transition écologique a été  évoquée dans la deuxième partie du discours intitulée : « Maintenir le cap et se préparer pour l’avenir ». La Présidente de la Commission  entend jouer la carte de l’hydrogène en lien avec le Pacte vert : une banque européenne de l’hydrogène sera créée qui aidera à construire le futur marché européen de l’hydrogène. Par ailleurs, forte de son rôle leader, l’Union poussera pour un accord mondial ambitieux  lors de la conférence des Nations unies sur la biodiversité qui se tiendra à Montréal cette année.

Les dossiers du numérique et de la défense européenne ont été, en tant que tels, absents du discours, au profit d’un point rapide sur la situation économique sous deux aspects : d’une part, un bilan actuel du plan de relance pour lutter contre la récession liée au Covid-19 ; d’autre part, quelques perspectives ont été avancées : une modification de la gouvernance économique de l’Union avec plus de souplesse en matière de désendettement des Etats membres ; la promotion d’un environnement propice à la stabilité et à la croissance grâce à des mesures de soutien notamment fiscales en faveur des PME, à  un investissement plus massif dans la formation initiale et continue mais aussi à la sécurisation de la chaîne d’approvisionnement des matières premières critiques (les terres rares, le lithium, le cobalt) obtenue par une diversification des pays fournisseurs.

Dans la 3ème partie de son discours, Mme von der Leyen a réaffirmé l’importance des valeurs européennes dans le projet européen.

Face à leur rejet à l’extérieur de l’UE qu’illustrent les massacres perpétrés par l’armée russe en Ukraine mais aussi parfois face à leur contestation par des pays membres comme la Hongrie ou la Pologne, la Présidente de la Commission propose de repenser le programme de politique étrangère de l’Union avec l’objectif de raffermir la démocratie dans tous les pays possibles, à commencer par les Etats candidats à l’adhésion des Balkans occidentaux, de l’Ukraine et de la Moldavie. Pour ce faire, elle soutient le projet français de Communauté politique européenne. Avec les pays plus lointains d’Afrique, d’Amérique latine, elle propose une stratégie de coopération plus large de type Global Gateway.

Au sein de l’Union, il s’agit de lutter contre les ingérences étrangères, de défendre l’Etat de droit et notamment l’indépendance de la justice et de combattre la corruption. Pour cela, la Présidente propose d’approfondir la démocratie en reprenant à son compte la recommandation faite par la Conférence sur l’avenir de l’Europe d’installer en tant que « composante permanente de notre vie démocratique », des panels de citoyens européens. Enfin,  pour renforcer la démocratie européenne, elle réitère le souhait de procéder, via une Convention, à une révision des traités qui consacrerait la « solidarité entre les générations » comme pilier de cette démocratie européenne.

 Si quelques voix critiques se sont élevées pour regretter un manque de vision politique, le rappel tout au long du discours des deux valeurs cardinales de l’Union que sont  la solidarité et de la démocratie, a été salué.

  

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