Du 16 au 27 mai s’est tenue la 27ème édition du festival de Cannes. Doté d’un caractère international depuis sa création en 1946, Cannes est le festival de cinéma qui a dans le monde le plus fort rayonnement et il est avec ses homologues et concurrents italien (La Mostra de Venise, première compétition internationale créée en 1938 par Mussolini) ou allemand (la Berlinale créée en 1951) l’une des vitrines majeures du cinéma sur le continent européen.
Quelle place y tient le cinéma européen et quelle place tient l’Europe dans cet événement qui dépasse très largement le seul cadre de la création artistique et qui est devenu au fil des ans un des marchés les plus importants de l’industrie cinématographique mondiale ?
Pour s’en tenir à la dimension économique de ce secteur, un rapport de l’Observatoire européen de l’Audiovisuel du Conseil de l’Europe [1] indique que la fréquentation des salles de cinéma dans les différents pays de l’Union européenne s’est rétablie après la chute spectaculaire de la pandémie ; il signale également que, même si les films grand-public d’Outre-Atlantique y demeurent une locomotive, la part des cinémas nationaux y est en progression avec, en tête, le cinéma français. Un cinéma européen qui résiste avec des valeurs sûres du cinéma d’auteur, l’Espagnol Almodovar, l’Italien Nanni Moretti, le Français Léos Carax… Cannes est aussi la vitrine de cette vigueur du cinéma européen : les Palmes d’Or attribuées cette année au film de Justine Triet (Anatomie d’une chute) et l’an dernier à Sans Filtre du suédois Rüben Ostlund, d’ailleurs installé en 2023 dans le fauteuil de président du jury, en témoignent, de même que le Prix du Jury qui est revenu cette année à un grand du cinéma européen, le Finlandais Aki Kaurismaki (Les feuilles mortes).
L’Union européenne était loin d’être absente de ce Cannes 2023 : quatorze des films présentés l’étaient avec le soutien du volet média du programme Europe-créative de la Commission européenne, parmi lesquels L’Enlèvement de Marco Bellochio. L’institution européenne est régulièrement représentée dans les travées du festival et c’est, cette année, Thierry Breton, le commissaire au marché intérieur qui est venu lui-même sur la Croisette ouvrir les débats du Forum du film européen pour y présenter son bilan et dévoiler le Média Outlook, la boussole chargée de fournir à la Commission les données de marché ainsi que les informations nécessaires à son intervention dans le secteur des médias. Parmi les défis que le cinéma européen doit relever dans les années qui viennent, Thierry Breton a insisté notamment sur l’émergence des plateformes et sur la protection des droits intellectuels à laquelle la Commission, assure-t-il, apporte une attention toute particulière comme elle entend continuer à accroître son aide financière à la création et aux salles notamment avec le relais du réseau Europa Cinémas [2].
Ce sont ainsi les valeurs européennes qui sont réaffirmées face à un marché hyperconcurrentiel : pour l’Europe, le cinéma est un art et un patrimoine culturel avant d’être une industrie.
[1] https://www.obs.coe.int/fr/web/observatoire/home/-/asset_publisher/wy5m8bRgOygg/content/eu-uk-cinema-attendance-down-by-70-7-in-2020-amid-global-pandem-1
2 Europa Cinémas a pour objectifs d’apporter un soutien opérationnel et financier aux salles qui s’engagent à accorder une part significative de leurs séances aux films européens non nationaux et à mettre en place des actions d’animation et de promotion en direction du Jeune Public.
Crédits photo: European Communities, 2006, © EC – Audiovisual Service